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Bertrand Wendling

Dernière mise à jour : Juin 2023

 

Directeur Général de la SATHOAN

« Nous demandons à l’ensemble de nos pêcheurs, tous métiers confondus, d’améliorer leurs pratiques : arrêter de débarquer les requins ou raies capturés et les libérer vivants en mer, gérer leurs déchets à bord, respecter rigoureusement les quotas… »

 

La SATHOAN est la plus ancienne et la plus importante Organisation de Producteurs de Méditerranée. Elle regroupe différents métiers : 14 senneurs, 16 chalutiers et 78 pêcheurs artisans polyvalents appelés les petits métiers en Méditerranée (dont 58 pêchent le thon rouge). Elle a en charge la gestion des droits de pêche et des quotas, la valorisation des produits et l’organisation des marchés. « Les adhérents de la SATHOAN pêchent plus d’une centaine d’espèces, mais l’espèce majoritaire reste le thon rouge. Le thon rouge a été fortement surexploité en Méditerranée dans les années 90.

Les scientifiques et les ONG ont été efficaces pour tirer la sonnette d’alarme. Suite à cette forte mobilisation, l’ICCAT* a pris des mesures fermes et a mis en œuvre un plan de reconstitution : les quotas ont été fortement réduits et les mesures de contrôles ont été renforcées. Ces mesures ont été douloureuses pour les pêcheurs, nombreux sont ceux qui ont perdu leur emploi, mais ils reconnaissent aujourd’hui que cela a été un mal pour un bien.

La pêche est désormais très réglementée et la population de thon rouge a retrouvé un niveau sain. »

La pêche du thon rouge de l’Atlantique Est et Méditerranée (Thunnus thynnus) a connu par ailleurs de profondes mutations lorsque la thonaille, un filet maillant dérivant, a été interdite par l’Union européenne en 2002 (application complète en France en 2007). « Les thonailleurs se sont progressivement reconvertis à la palangre et à la canne, et nous avons développé une pêcherie de thon rouge de ligne. Nous avons lancé en 2014 la marque collective « Thon rouge de ligne – pêche artisanale », pour promouvoir et valoriser les pratiques de nos pêcheurs artisans. Cette pêcherie de thon rouge de ligne a été par ailleurs éco-labellisée « Pêche Durable » en 2019 et MSC en 2020. »

La SATHOAN mène de nombreux projets afin de continuer à améliorer la durabilité de cette pêcherie et de cette espèce. « La palangre peut être responsable de prises accessoires (requins, raies…) et de prises accidentelles (oiseaux, tortues…).

Nous avons créé l’application Echosea© qui permet aux pêcheurs de répertorier leurs observations, les captures accidentelles et accessoires, et indiquer ce qu’ils en font, afin d’établir un meilleur suivi des pratiques. Nous travaillons également avec la société Fishtek sur le projet Shark Guard, qui vise à fixer sur les hameçons des émetteurs d’ondes électriques à très faible intensité qui éloignent les requins et les raies afin d’éviter qu’ils ne mordent à l’hameçon. Le dispositif a été testé avec succès en 2019 et de nouveaux tests sont réalisés en 2021. Nous demandons à l’ensemble de nos pêcheurs, tous métiers confondus, d’améliorer leurs pratiques : arrêter de débarquer les requins ou raies capturés et les libérer vivants en mer, gérer leurs déchets à bord, respecter rigoureusement les quotas… ».

La SATHOAN est gestionnaire d’environ 70 % du quota français de thon rouge. La répartition des quotas entre les senneurs et les pêcheurs artisans suscite souvent des interrogations.

« On nous pose régulièrement la question sur la répartition des quotas entre métiers de l’hameçon (palangre, canne, ligne) ce qui est légitime. La répartition des quotas se base sur plusieurs critères, dont celui des antériorités, c’est-à-dire les déclarations de pêche des années dites de référence. Ainsi, une part du quota octroyé est proportionnelle aux captures réalisées au cours des années de référence. Cela permet de prendre en compte, l’historique de l’activité. Lorsque la thonaille a été interdite, les pêcheurs artisans se sont convertis progressivement à la palangre ou à la canne. Malheureusement, les pêcheurs artisans ne tenaient pas toujours à jour leurs obligations déclaratives, et certains n’ont pu disposer d’antériorités. Cependant, pour permettre le développement de la pêcherie artisanale en Méditerranée française et autoriser l’entrée de nouveaux professionnels, la profession a décidé d’allouer un quota minimum socio-économique aux « nouveaux » entrants sans antériorité (et donc sans quota). Pour ne pas pénaliser les pêcheurs artisans déjà en activité, un transfert de quota a été opéré du segment des senneurs au profit de la flottille de petits métiers. Ce transfert a permis d’accroître le quota des pêcheurs artisans de 230 tonnes en 2013 à plus de 720 tonnes en 2023. Par ailleurs, le nombre de licences de pêche artisanale est passé de 80 à 140. Jusqu’en 2023, les nouvelles licences de pêche au thon rouge pour les pêcheurs artisans sont accordées uniquement à des ligneurs et canneurs. Rappelons que les senneurs ne pêchent que le thon rouge, alors que les artisans sont polyvalents et pratiquent plusieurs métiers : le filet, le pot à poulpe, la palangre sur plusieurs espèces, la nasse…

Notre but est de s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue. Nous souhaitons continuer à mener notre activité vers plus de durabilité et ne pas retomber dans les travers du passé : surcapacité des flottilles, pêches non déclarées et surexploitation de la ressource. Suite aux dernières évaluations scientifiques de l’ICCAT en novembre 2022, la SATHOAN a sollicité auprès des instances nationales et internationales, la mise en œuvre d’une nouvelle procédure de gestion, afin d’assurer une gestion durable du thon rouge. Cette nouvelle procédure a été actée pour la première fois en 2023 ; elle est le fruit d’une collaboration étroite entre les scientifiques, les gestionnaires et les parties prenantes et devrait garantir une pêche durable à long terme du stock Atlantique Ouest et du stock Atlantique Est et Méditerranée. »

 


 

* Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (ICCAT en anglais)